dimanche 4 août 2019

Me parler dans ma tête.
Seul endroit où la schizophrène a le droit de parole.
Le droit de raconter sa moitié de vie.
Ses souvenirs, ses désirs, ses attentes.
Refermer la porte dès que le monde extérieur entre pour éviter la collision.
Chut.
Ceci ne m'appartient que si peu...

dimanche 2 juin 2019

C'était la dernière soirée avant les trois prochains mois. Trois et mois et demi dans ma vie droite et carrée, loin de la liberté que je procure ces voyages, loin de la ville.

Ça a commencé doucement par un apéro, quelques rires, le resto, les grimaces sur les photos. Puis il y a eu la marche pour trouver un chouette bar, l'échec et la capitulation, la lumière tamisée, les toilettes collantes, les confidences. Même des pleurs parce que C., toujours. Puis le numéro de A. donné au barman, les délires partagés, le retour, la musique un peu, mais aussi la fatigue. Et comme je pensais que j'allais aller me coucher bien sagement, il y a eu le dérapage.

Danser sur la table. Rire aux éclats. Se déguiser en castor. Chanter à tue-tête sans connaitre les paroles. Sortir sous la pluie et râler. Prendre un shot dans un bar minable. Écrire à M. Hurler au chauffeur de taxi que je me fais kidnapper. Envahir la piste de danse du bar numéro 2. Rire encore. Oublier qu'il y aura un matin après la nuit. Faire venir un lift de Villeray. Rentrer aux petites heures.

Demain, quand les roues de l'avion se poseront de l'autre côté de l'océan, quand je rentrerai dans cette grande maison pour reprendre mon rôle de mère, de femme, j'aurai dans un coin de ma tête ces heures passées avec eux, cette folle insouciance, ces délires.

Et je tiendrai bon jusqu'en septembre. 

lundi 20 mai 2019

« Et quand le jour se lève, je reviens vers toi.  Ce que je reconnais, ce n’est que vide en moi » 

 Dès qu'il y a un espace dans ma tête, il y a toi. Formé de souvenirs déformés, d'images tapies dans le fond de ce cerveau qui ne veut garder que le beau. 

Le parc. Moi devant les phares de ta voiture. Ta voix au téléphone qui me fait trembler. Les baisers fougueux dans la voiture. Ta main qui me retient. L'odeur de ton corps. Les bêtises. Les attentions. Le lit king. 

Et tout le reste aussi. La tension. Les mots, durs. Les regards. Les fuites. Cette violence qui a toujours couvé. Qui est ce qui nous relie, nous attache l'un à l'autre. Nous attire. Papillons de nuit. 

« Comme une prémonition, on ne changera pas. On ne changera pas » 

Alors je m'enroule dans des chansons qui me rappellent que ce sera toujours la même chose. Tu l'as déjà dit, ce soir-là, dans la voiture, quand j'ai décidé de ne pas te faire la bise pour ne pas éveiller la tentation, que tu as attrapé mon bras pour me retenir au moment où je poussais la portière. 

« C'est nous. On ne changera pas. » 

dimanche 12 mai 2019

Dimanche

Je n'avais envie de voir personne.
Il y a eu hier, déjà, dans cette fête au bout du monde avec trop d'inconnus où je suis allée chercher au fond de moi-même ces sourires, ces phrases toutes faites, ces conversations à continuer.
Et c'est dimanche.
De ceux où j'ai juste envie d'être sous la couette ou enfermée dans mon bureau, à me balancer dans mon hamac et à lire sans me poser de question. Sans parler à d'autres humains sinon vous.
Mais voilà, il y avait après-midi jeux.
Et ensuite souper en famille.
Je me suis d'abord terrée, mais tu m'as trouvée.
Et j'ai fait une première tentative qui s'est soldée en retraite dans les toilettes. Je ne voulais pas gérer. Je n'en avais pas envie.
Pour une raison que je ne m'explique pas, les gens chez moi font monter le stress à un niveau terrible. Je veux être parfaite. Je veux être cette femme qui reçoit bien que je ne suis pas. Cette femme au foyer qui me fait horreur le reste du temps.
Et aujourd'hui mes envies ne cadraient pas avec ce qu'il me restait de sociabilité.
J'ai fait une deuxième tentative.
Je me suis calée dans un fauteuil, j'ai pris un verre et j'ai décidé de laisser couler.
Et doucement, les muscles se sont dénoués.
J'ai même ri.
Pris du plaisir.
Mais je ne mentirai pas : quand ils sont partis, j'ai poussé un soupir de soulagement. Et je suis allée me cacher dans ma couette imaginaire.

mardi 30 avril 2019


Ce soir-là, tu n’allais pas bien. Il y avait bien tes bras autour de moi et tes sourires, mais je sentais l’urgence d’engourdir quelque chose au fond de ton ventre. 
- Je veux encore un verre avant d’aller dormir.
Je n’ai rien dit mais j’ai noté mentalement le défaut. L’accroc. Je connais ce regard. Cet appel. Je ne le veux pas dans ma vie. Mais comme tu n’y es pas vraiment, comme tu ne t’y glisses que par intermittence, comme tout le reste pèse trop dans la balance, je n’ai rien dit.
Tu as ronflé. Fort. Et je t’ai poussé, mais ça n’a rien changé. 
Alors au milieu de la nuit, je me suis levée pour aller dormir plutôt sur le canapé. Dans le noir, incapable de trouver une couverture, j’ai agrippé mon manteau, emprunté une serviette et je me suis construis un nid pour les quelques heures avant le réveil.
Brutal.
Tu as allumé la pleine lumière sans avertissement, j’ai crié, tu as crié.
- Mais qu’est-ce que tu fais là ?
Dans le noir de la chambre, tu as pensé que ton réveil avait été assez subtil pour ne pas me tirer de mes propres songes et tu t’es glissé à pas de loup hors de la pièce. Pensant me laisser dormir. 
J’ai ri.
- Ton sens de l’observation est fantastique, vraiment.
J’ai pris ta main et je t’ai ramené sous les draps. Les matins m’appartiennent. 

mercredi 4 avril 2018

Je suis désormais encore plus une petite chose fragile.

Je ne sais pas si tu as réalisé qu'en mettant fin à ta vie, en décidant de foncer dans ce mur pour ne plus jamais souffrir, tu as creusé une faille dans le corps de tous ceux qui t'aim(ai)ent.

Une faille permanente. Qu'on peut couvrir de vêtements, de moments de rire, d'assez de bulles pour oublier, mais qui reste là. Qui pulse en moi. Boum. Boum.

Rationnellement, je comprends que ta souffrance devait être tellement grande que tu ne pouvais plus vivre avec.

Émotionnellement, ma colère n'a aucune limite.

dimanche 25 mars 2018

Il y a une semaine maintenant que la bombe a explosé.

J'attends impatiemment le moment où tu me diras que ce n'est qu'une blague.

Ce matin, mon réflexe a été de vérifier mon téléphone. Parfois, bien saoul, tu m'écrivais à trois heures du matin pour me dire que j'étais la meilleure soeur au monde.

Je me sens seule.

mercredi 21 mars 2018

4.

Déjà.

Tout ça vient par vagues. Il y a des moments où je me sens forte. D'autres où le monde s'écroule. Et d'autres encore où je me trouve dans des situations délirantes que tu aurais adorées.

Comme A. qui appelle des fleuristes parce que je ne sais plus comment nous est venu l'idée qu'un bouquet de fleurs en forme de moustache serait juste parfait pour toi le jour F.

Les gens lui souhaitent leurs sympathies, puis lui demandent le genre de moustache qu'elle souhaite. Et elle qui répond : « Une moustache laide et impressionnante. Il arborait fièrement une très laide moustache. » Et les gens rigolent, puis s'excusent de rire...

Tu aurais ri aussi. Je t'entends encore. Et ça me brise le coeur de savoir que tu ne riras jamais plus avec moi.

mardi 20 mars 2018

Jour trois.

J'apprivoise les mots.

Décédé.
Corps.
Exposition.

Je hurle en silence.

A. m'a dit : « Je voudrais te dire que ça passe rapidement, mais je ne te mens jamais, tu le sais bien. »

La douleur toujours aussi présente.
La colère aussi. Vague de fond qui revient quand je pense à tout ce que nous n'aurons pas. Ne vivrons pas. Ne partagerons pas.

Seule la vulgarité me donne les mots pour dire ce que je ressens.
La vie est une salope.
Je me répète, mais ça n'a pas d'importance.

lundi 19 mars 2018

Jour 2 après toi.

J'ai toujours cru que les auteurs exagéraient quand il est question de deuil. Je me rends compte aujourd'hui qu'aucun mot ne pourrait rendre le vide que tu as laissé. Que je passerais six cents pages à décrire des souvenirs, à documenter tout ce qui me rappelle toi dans mon quotidien.

Z. est maintenant la reine des grimaces de la famille et c'est d'une tristesse infinie.


dimanche 18 mars 2018

La vie est une salope.

Il n'y a pas d'autres mots pour ce vide immense qui s'est créé en moi. Pour cette douleur si hurlante dans chaque muscle de mon corps. Dans chaque cellule de mon coeur. Je ne pensais jamais pouvoir autant pleurer.

J'ai l'air une actrice de série B.

Et je suis en colère...

J'en veux à cet accident de m'avoir volé dix ans de souvenirs avec toi. De ne plus savoir à quoi tu ressemblais quand tu étais bébé. Quand je t'ai appris à lire. Quand tu m'as couru après dans le but de me tuer (anecdote que j'ai toujours trouvé croustillante et qui me semble amère à présent).

J'en veux à notre passion pour notre boulot, de celles qui font qu'on se pousse toujours trop loin.

J'en veux à ceux qui étaient près de toi et qui n'ont pas vu que tu était trop fatigué pour prendre la route.

J'en veux à celui qui m'a dit que tu étais conscient au moment où sont arrivés les secours parce que ça signifie que tu as vu la mort venir et que je n'ai plus que cette image en tête.

Tu étais mon modèle. Tu l'es encore. Tu resteras toujours mon étoile filante.

(Et si tu vois ce texte et que tu me connais sache que je ne veux pas de condoléances. Je veux juste que ce ne soit pas arrivé. Ne m'en parle pas.)

dimanche 7 janvier 2018

Quatorze jours de vacances. Notre réflexe est de s'étourdir. Sortir, voir des gens, courir partout. Surtout pas trop longtemps à la maison, juste entre nous.

Et puis cette fois il y a eu erreur. Oubli. Nos plans se sont transformés en châteaux de cartes trop facilement soufflés. Et il y a eu ce désert dans l'agenda. Cette traversée qu'on imaginait terrible. Ces tensions qu'on voyait presque se profiler.

Et puis il y a eu juste nous. Des rires. Elles ont vieilli, cette maison est assez grande pour contenir tous nos silences, tous nos besoins de solitude. Pour laisser respirer nos coeurs et nous permettre d'être heureux. Ensemble.

Demain arrive trop vite. On se prend à espérer pouvoir rester encore un peu dans la bulle. Comme quoi...

samedi 17 décembre 2016

Dix ans. 

La rondeur, l’implication de ce chiffre me rendait folle d’avance. On a voulu faire une fête, inviter tous les copains à manger une lasagne anniversaire avec nous et puis on a tout annulé. Il y avait un conflit d’horaire, oui, mais surtout cette peur…

Et puis la vie est passée par là et j’ai oublié d’appréhender cette journée. Ce n’est que sur le coup de 16 heures que j’ai pris conscience de l’anniversaire. 

Je t’ai acheté des fleurs (une plante de Noël parce qu’après toutes ces années je ne pouvais décemment pas t’acheter des roses) et tu m’attendais avec une bouteille de champagne. 

On a ri, on a passé une belle soirée.

Et on aurait dû laisser de côté les sujets qui fâchent, mais c’est bien mal nous connaitre. 


On a fini par se dire qu’à force de toujours s’emporter, de ne pas se comprendre, de s’embrouiller pour des broutilles, on ne se rendrait pas à dix ans de plus. Et pour sceller le pacte, on s’est embrassés. 

vendredi 23 septembre 2016

Chacun à notre bout de l'océan, nous nous sommes promis de faire attention cette fois-ci, en souvenir des assiettes brisées, des coups de gueule et des mots lancés sans être pensés.

- Tu seras fatigué d'avoir tout géré pendant plus de deux semaines, tu seras énervé de me voir me répandre dans chaque pièce comme je sais si bien le faire et moi je serai à fleur de peau pour cause de fatigue accumulée, de vol pas confortable, d'heures de sommeil manquantes. Mais nous tenterons d'être de grandes personnes et de rester zen. Ok?

Chacun devant notre écran, nous avons promis et j'ai espéré très fort que tes doigts ne soient pas croisés sous la caméra.

Il y a bien eu la fatigue, les quelques regards énervés et les petits chocs du retour à la vie à deux, mais nous les avons oublié grâce à la chaleur des sourires, des mains qui trainent dans le bas du dos, de l'odeur de l'autre, retrouvée. Et d'heures en heures, nous réapprivoisons la vie à deux. Avant le prochain départ...

mardi 19 avril 2016

Mesurer l'amour que je leur porte au nombre de noeuds qui me tordent l'estomac avant le départ. Encore.

vendredi 11 mars 2016

Ouvrir des bulles pour tout et n'importe quoi.

Parce qu'un jour en visite chez des amis qui ont ouvert le champagne en nous disant que ce n'était pas exceptionnel, qu'ils fréquentaient un petit producteur pas très cher, à trois heures de route, j'ai dit: Moi aussi, un jour, je garderai toujours des bulles dans mon réfrigérateur.

Les ouvrir pour des amis de passage, une bonne nouvelle, une mauvaise journée, une envie soudaine.

Ouvrir des bulles pour tout et n'importe quoi.
Comme ce soir. Ouvrir des bulles pour la vie qui passe, pour les lettres qui arrivent, pour les projets à venir, pour les cris des enfants surexcités, pour les petits pas qu'on fait sur la ligne de nos rêves.

dimanche 6 mars 2016

Quitter le début de soirée et les bulles pour reprendre la route jusqu'au restaurant où j'ai laissé mon téléphone. Seule dans le noir de l'habitacle, rejoindre l'autoroute à travers des petites rues sinueuses, des villages inconnus dont les contours sont brouillés par la pluie. Voir Paris 300 km. Hésiter. Suivre le mouvement de la voiture, laissant Paris derrière pour plutôt foncer à la friterie récupérer le téléphone, revenir vers Lui, Z. et C., tous les copains. Mais être rassurée, quelque part, de me rappeler que la Ville Lumière n'est qu'à un coup de volant, qu'à une envie de fuite, de moi. Atteignable.

dimanche 21 février 2016

Bouffée de ville. 
Marcher pour aller travailler, surprendre les passants en dansant au rythme de la musique dans mes oreilles, boire du mousseux à la fin de la journée, rentrer par les petites rues, sans avoir peur de se perdre... ou enfin, si, un peu, puisque cette ville n'est pas "la mienne". Merci pour ces quelques jours, Bruxelles.

mardi 17 novembre 2015

J'ai envie d'autres bras. Pas de bras nus pour des étreintes fiévreuses, mais des bras habillés de laine, réconfortants, dans lesquels je pourrais abandonner quelques instants mes vents du large et mes doutes. Enveloppe-moi, doucement, sans rien dire.

lundi 16 novembre 2015

Montréal. Comme une bouffée d'air pur, le sentiment que je suis à ma place, entre les appartements en ligne, les escaliers, la foule pressée.