samedi 4 novembre 2006

Hier

J'ai fait du patinage artistique pendant huit ans. J'ai raccroché mes patins parce que je n'arrivais plus à atteindre les exigences de mes professeurs en ayant du plaisir. Parce que patiner était devenu une corvée, parce qu'il m'arrivait de pleurer le soir en rentrant devant mes pieds qui grandissaient et refusaient d'avoir la puissance nécessaire pour supporter mon corps en expansion dans des doubles et triples envolées et que, parfois, je me cachais des les vestiaires pour écouler mon temps de pratique.

Les trois années qui ont suivi, j'ai parfois pris mon sac en cachette, glissé mes pieds, même si trop grands, dans mes vieux patins et tenté quelques figures sur le lac gelé d'un terrain vague pas trop loin de chez moi. Jusqu'à ce que mes pieds n'entrent plus dans les bottines blanches.

Je suis allée patiner, hier. Je ressors de ces rencontres avec la glace toujours un peu heureuse, un peu mélancolique.

Je n'y peux rien, je suis incapable de ne pas penser aux longues années où mes patins pouvaient me permettre de conquérir un monde terrifiant d'arabesques, de pirouettes et de sauts. Maintenant, sur des patins loués trop mous ou trop durs, mes pieds ne se souviennent plus des mouvements à faire et j'ai l'impression qu'ils se jouent un peu de moi.

J'ai quand même eu beaucoup de plaisir. Juste de glisser, gants rayés rose et noir aux mains, foulard au cou, sur une surface blanche, ça me rend pleine d'un bonheur de petite fille. N. m'a fait rire, il a dédramatisé mes piètres exploits et il m'a même convaincue d'expérimenter la chute ( volontaire et sans réel danger) sans craindre de blesser ce dos qui depuis l'accident me donne mille et une frousse.

Je suis ressortie de la patinoire un peu plus légère, un peu moins frustrée de ma condition actuelle, en me promettant que cette fois, je ne passerais pas deux ans avant de remettre des lames sous mes pieds parce qu'après tout, le plaisir peut être tout simplement de jouer, sans être centré sur la perfomance comme on me l'a longtemps enseigné.

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