lundi 26 février 2007

Il est arrivé sans bruit et il s'est glissé dans la foule des invités. J'étais au bar, profitant d'un moment de répit. Il m'a tapé sur l'épaule. Quand je me suis retournée, tout son être m'a percuté. Lui.
" Je voulais te faire une surprise."
On a presque rien dit. Il a fait le tour pendant que je me suis libérée de ma conversation. J'ai foncé vers le vestiaire, pris le premier veston qui m'est tombé sous la main et je l'ai rejoint sous un dessin.
" Dehors, c'est mieux."
Je ne voulais personne autour de nous quand les trois mois de silence s'évanouiraient. Nous avons dit des banalités alors que je tremblais de froid. Il a offert de me prêter son manteau mais j'ai refusé de me retrouver de nouveau dans ses choses. Le temps passe. J'ai dit:
"Tu m'as manqué, idiot."
Il m'a serré dans ses bras et j'ai fermé les yeux, envahie par son odeur si particulière, si familière, si enivrante. Je me suis lentement reculée, j'ai repris mon équilibre. Derrière la vitre, l'autre me saluait.
"C'est qui?"
Je l'ai dit, haut et fort. Mon copain. Comme si les mots avaient la force de le faire reculer. Il a sourit, m'a dit qu'il devait être inquiet. On a continué à dire des stupidités qui voulaient dire autres choses et puis lentement je me suis mise à trembler de plus en plus fort et j'ai décidé de rentrer.
"Tu ne viens pas?"
Il a secoué la tête. Ce n'était pas sa place et j'étais d'accord, mais l'instant avait été trop court. Nous avons pris rendez-vous pour souper, le lendemain. J'ai poussé la porte. À l'intérieur, personne n'avait senti le tremblement de terre. Du fond de la salle, mon copain m'a sourit et m'a soufflé un baiser. J'ai murmuré:
"Je t'aime."
J'ai lancé l'invitation comme ça, sans fioritures.
"Venez voir un peu ce qui se trame dans ma tête".
J'ai baptisé l'expérience fragments d'imaginaire et j'ai passé quelques mois en attente du jour fatidique.
Et puis, tranquillement, c'est arrivé.
Hier.
Je me réveille ce matin en me disant que cette journée est à rouler en petite boule pour la mettre dans la boite des moments de bonheur.

jeudi 22 février 2007

Dans tes silences, mes sens chuchotés qui se recroquevillent de peur de prendre trop de place.

mercredi 21 février 2007

En vieillissant, les petites imperfections me dérangent moins.
Par exemple, je ne jette plus une feuille sur laquelle j'ai déjà écrit une demi-page pour la simple raison qu'elle est froissée dans le coin droit.

Je n'ai pas encore décidé si c'est parce que je deviens moins obsessive ou si c'est parce que ma conscience écologique s'énerve.

mardi 20 février 2007

Je suis dans le salon de la maison bleue, assise sur le sol devant l'immense fenêtre qui couvre deux étages. J'entends des voix mais je ne sais pas qui. Des voix-femmes et des voix-hommes qui s'entrechoquent et qui se baisent. Mes mains sont petites, comme si elles n'avaient pas encore grandi. Ou oublié. Le reste du corps je ne sais pas, je ne veux pas voir. De l'autre côté de la vitre, trois petites filles me font des grimaces. Elles ont toutes des robes rouges.

Je ferme les yeux.
Au Mexique, il y a des Haciendas et des Mariachis.
Moi j'ai un puit de lumière couvert de neige, une porte d'entrée qui gèle de l'intérieur, des champignons qui poussent sournoisement sous la céramique de la salle de bain.

lundi 19 février 2007

Parfois, j'en veux à mes pieds de leur manque de mémoire. J'ai l'impression qu'en hiver ils m'abandonnent, délaissant les rues inconnues pour des repères plus sécuritaires.

Matin.
14 marches pour se retrouver sur la rues. 38 pas jusqu'au métro, on pousse la porte, ouf, chaleur. Un escalier, deux escaliers. Huit stations jusqu'à Berri. On sort, un escalier. Le mardi, il faut prendre le long corridor, affronter de nouveau le dehors. Le pavillon est loin. Dix étages à grimper sans perdre le souffle. Ouf, chaleur.
Et puis sens inverse, exactement.

Il est où le parc?
Je ne sais plus. Attends le printemps...

samedi 17 février 2007

"Combien d'étoiles,
Pour un trou noir..."

J'ai dit:
Dans le nous, des risques et des probabilités infinies de se blesser, de dire un jour un mot de trop et de mourir. Je te l'ai murmuré l'autre nuit alors que tu dormais, mais je ne peux que le redire encore. J'ai peur de souffrir.

jeudi 15 février 2007

Ma ville est blanche-neige.
Par jour de grands vents je marche à contre-sens pour ne pas voir le regard des gens sur ma nudité.

mercredi 14 février 2007

Une carte dans ma boîte aux lettres. Une fille en talons terriblement hauts qui se bat contre une rafale de vent. Un kiosque qui offre des promesses de bonheur en forme de fleurs. Des hommes qui se débattent avec leur malette et leur bouquet dans le métro.

Et le sourire, le sourire magique de ma soeur lorsqu'elle a compris que le rendez-vous qui l'attendait à la réception c'était moi, surmontée de mon horrible tuque multicolore.

mardi 13 février 2007

Je lui ai dit:
Qu'est ce que la fuite sinon la peur? Les gens ont peur de toutes sortes de choses. Moi, j'ai peur des gens. Peur qu'ils existent, qu'ils me regardent, qu'ils s'attachent, qu'ils m'attachent, qu'ils me désirent, qu'ils me dévorent.
Mais surtout, j'ai peur qu'ils n'existent pas, qu'ils ne me regardent pas, qu'ils ne s'attachent pas, qu'ils me rejettent.
Alors je fuis d'abord. Je rejette avant. Je fais l'action au lieu de la subir. Je me force à avoir mal un peu au lieu de souffrir beaucoup. Et ce n'est ni mal ni bien parce que c'est le seul moyen efficace de survie que je connaisse et que la survie, ce n'est pas un jeu d'enfants.

Il m'a répondu:
Tu es égoiste.

Je l'ai giflé.

samedi 10 février 2007

Quelque part au milieu du balcon du National, du Dumas plein les oreilles.

Quoi? Tu as dis quelque chose?

mercredi 7 février 2007

Souvent,
quand je rencontre des gens nouveaux, seuls ou en groupe, je perds l'usage de la parole.
Ils sont devant moi, prêts à me laisser la chance de les ébouir et... Non, rien. Les idées jouent à cache-cache, je me contente de sourire, de détourner la tête, d'avoir l'air de trouver le temps long alors que je cherche maladroitement sous les couches de timidité la phrase qui les retiendrait un peu. Quelques minutes, quelques heures, quelques rencontres. Pour que j'aie le temps de les apprivoiser, de me laisser approcher, de lentement glisser les mots le long d'un fil de soie et de créer un petit quelque chose de spécial, entre eux et moi.
Mais la vie passe vite. Les gens pressés ne font pas don de leur temps et les mots se gardent plutôt pour ceux qui savent, qui ont osé jadis et qui aujourd'hui partagent un petit quelque chose de spécial...

lundi 5 février 2007

Je l'ai averti:
Ne laisse rien chez moi et je ferai pareil chez toi. Ne mélangeons pas nos espaces. Si on se mélange on peut se perdre et ça finit toujours mal quand je dois aller laisser sur le balcon de l'autre sa brosse à dent dans un sac en plastique.

Il n'a rien dit et, pendant un moment, il repartait avec toutes ses choses.

Et puis sans que je m'en rende compte au début, il y a eu des oublis. Une odeur sur l'oreiller, une trace de bottes dans le vestibule, un sourire sur le miroir de la salle de bain.

Un soir il est rentré et j'avais déposé son savon et son shampoing dans sa deuxième paire de soulier sur le balcon. Devant son air ahuri, j'ai expliqué que je me sentais envahie.

Il n'a rien dit et, pendant un moment, il repartait de nouveau avec toutes ses choses.

Et puis boum, je me réveille un lundi matin et il y a quelques de ses bd dans ma bibliothèque, sa brosse à dent sur le haut de mon armoire, son mailhot de bain sur mon sèche-linge.

Le pire, c'est que je me sens de moins en moins envahie. Décidement, je ramolli.

dimanche 4 février 2007

Dimanche soir. J'ai le front qui bouillonne et le corps secoué de frissons. Sur l'écran, des hommes trempés qui luttent pour un trophée. Il a fait la cuisine et m'a recouverte d'une immense couette sous laquelle mon rhume disparait, oublié.
Ce ne sera pas la fête comme prévu, mais je ne suis pas sûre de regretter.

jeudi 1 février 2007

Et dans la pénombre, alors que mes mains glissent sur sa peau nue, quelques cicatrices.
Des souvenirs de l'enfance passée, des secrets tus dans l'air mais ineffaçables. Je les regarde, les apprends, les mémorise.
Je poserai les questions plus tard.